{{ ads }}Les sénateurs ont donné leur feu vert au délai de résiliation d’un an de l'assurance emprunteur, qu'auront désormais tous les acquéreurs de bien immobilier. Bourse des Crédits revient sur cette réforme avec Mélanie d'Hem.
Et si vous changiez votre assurance emprunteur ? Les sénateurs ont en effet donné leur feu vert au délai de résiliation d’un an de l'assurance emprunteur, qu'auront désormais tous les acquéreurs de bien immobilier. Bourse des Crédits revient sur cette réforme avec Mélanie d’Hem, responsable Juridique et Conformité pour Afi-Esca qui a répondu à nos questions. Interview par Johan Garcia.
Qu’apporte de nouveau cette réglementation ?
Mélanie d’Hem : "Le projet de loi Hamon institue le droit, pour toutemprunteur, dans le cadre d’un crédit immobilier, de résilier soncontrat d’assurance pendant la première année suivant la signature de l’offre de prêt.
Il faut préciser que cette faculté de résiliation existe déjà dans un grand nombre de contrats, mais rarement dans ceux souscrits par des établissements bancaires".
Pourquoi la loi Lagarde n’était-elle plus suffisante ?
M.D’H : "Le succès tout relatif de la loi Lagarde est lié à l’introduction de la notion d’équivalence du niveau de garanties. Cet argument a permis à certains établissements bancaires de refuser les délégations de façon industrielle, dans la mesure où, dans l’étude de cette équivalence, le prêteur se trouve être à la fois juge et partie.
La loi de séparation et de régulation des activités bancaires (26 juillet 2013) est venue compléter le dispositif initié par la loi Lagarde en 2010, censé permettre à l’emprunteur d’assurer son prêt auprès de l’assureur de son choix. Elle va un peu plus loin dans les contraintes imposées aux banques en termes d’information de l’emprunteur, interdit la pratique des frais de délégation,…
Mais pour renforcer encore le droit des emprunteurs, il fallait leur permettre d’imposer la délégation d’assurance à un moment qui soit déconnecté de celui de l’octroi du crédit".
Quels seront les impacts de la loi Hamon sur l’assurance emprunteur et donc sur les consommateurs ?
M.D’H : "Aujourd’hui, les emprunteurs n’ont pas tous connaissance de la liberté de choix offerte par la loi Lagarde. Ceux qui sont sensibilisés au sujet, tentent le coup, mais n’osent pas se montrer trop vindicatifs vis-à-vis de la banque, de peur de se voir opposer un refus du financement.
La loi Hamon permettra à ces derniers de signer leur demande d’adhésion au contrat de groupe, puis de demander la substitution de contrat, au profit de celui qu’ils auront choisi, en fonction des garanties proposées, des prestations offertes, et du tarif annoncé, évidemment !
A ce stade, la question de la pression, trop souvent exercée par le prêteur en phase d’étude du financement, ne se posera plus, ce qui laissera une latitude plus grande à l’emprunteur pour faire valoir ses droits".
Quelles seront les démarches à accomplir pour changer d’assurance ?
M.D’H : "En l’état actuel du texte, voici quelle sera la marche à suivre :
L’emprunteur adresse dans un premier temps à sa banque une demande de substitution, en présentant un autre contrat d’assurance. (NB : Cela suppose que le nouveau contrat est déjà souscrit, et que le nouvel assureur a donc bien accepté le risque. Il est important de le préciser, car un certain nombre de détracteurs font déjà valoir qu’en permettant à l’emprunteur de résilier son contrat d’assurance, on lui fait courir le risque d’être privé d’assurance, en cas de modification de son état de santé depuis l’adhésion au premier contrat.)
Si la substitution est acceptée, le prêteur modifie par voie d’avenant le contrat de prêt, en y mentionnant notamment le nouveau TEG calculé.
L’assuré notifie ensuite à l’assureur par lettre recommandée sa demande de résiliation au plus tard 15 jours avant l’expiration du délai de 12 mois suivant la signature de l’offre de prêt, ainsi que la décision du prêteur. La résiliation du contrat d’assurance prendra effet 10 jours après la réception par l’assureur de la décision du prêteur d’accepter la substitution de contrat".
Le délai d’un an pour changer d’assurance, après la signature du contrat, sera-t-il suffisant ?
M.D’H : "Cette limitation du délai ne permettra pas à tous les emprunteurs de bénéficier du dispositif. Cela sera le cas notamment des emprunteurs liés par un contrat de crédit antérieur à l’entrée en vigueur de la loi. Ce sont pourtant ces emprunteurs, liés par une adhésion à un contrat de groupe ancien aux garanties parfois minimalistes (bien souvent limitées à la perte de revenu), qui auraient eu le plus intérêt à en profiter…
L’opportunité de changer d’assurance peut se présenter plus d’un an après la signature du contrat de prêt, notamment dans le cas d’un changement d’activité professionnelle. On permet aux emprunteurs de faire évoluer leur prêt avec leur situation… Pourquoi n’en ferait-on pas autant pour l’assurance ?"
La résiliation du contrat d’assurance restera-t-elle au bon vouloir de la banque au-delà du délai de 12 mois ?
M.D’H : "Il faut à ce sujet signaler des pratiques très différentes selon les établissements bancaires. Certains d’entre eux ont rapidement joué le jeu de la loi Lagarde, tandis que d’autres refusaient systématiquement la délégation d’assurance (sauf dans le cas de risques aggravés…).
Alors qu’aujourd’hui, la loi Hamon n’est pas encore votée, certains établissements bancaires acceptent la substitution d’assurance lorsque, dans le cadre de leur devoir de conseil, ils admettent que le contrat proposé présente des garanties mieux adaptées aux besoins et aux attentes de l’emprunteur.
D’autres, au contraire, se contentent de faire valoir que le contrat de prêt ne prévoit pas la possibilité de modifier l’assurance en cours de prêt.
Il faut s’attendre à la même dichotomie s’agissant du droit de résiliation, même dans le délai de 12 mois ! Car, rappelons-le, ce droit ne sera pas inconditionnel. L’établissement prêteur pourra toujours faire valoir que le niveau des garanties n’est pas équivalent pour refuser la substitution.
Le texte, dans sa version actuelle, prévoit également que la faculté de substitution peut subsister au-delà de la première année, si le contrat de prêt le permet, et dans les conditions précisées dans ce même contrat".
La loi Hamon interdit les frais de dossier, mais garantit-elle l’absence de pénalités ? (Infligés par les banques aux emprunteurs souhaitant changer d’assurance)
M.D’H : "Ce n’est qu’à l’usage qu’on pourra détecter ce type de pratiques. En tout état de cause, l’objectif est d’interdire la facturation de « frais supplémentaires », ce qui inclut frais de dossier, frais d’étude et pénalités de toute nature, si ceux-ci sont indiscutablement liés à la substitution d’assurance".
Quelles sanctions seront mises en place par cette réglementation à l’encontre des assureurs qui refuseraient la résiliation ?
M.D’H : "En l’état actuel du texte, les assureurs ne pourront s’opposer à la résiliation, dès lors que la banque l’aura acceptée. Le contrat sera considéré comme résilié dix jours après la réception par l’assureur de la décision du prêteur.
Néanmoins, il faut s’attendre à une certaine réticence de la part de l’assureur évincé. Celui-ci pourra notamment tarder à stopper le prélèvement de la prime d’assurance, rechigner à rembourser le trop-perçu de primes,…
Aucune disposition spécifique ne vient pour le moment sanctionner ce type de pratiques. Mais il me semble que le consommateur serait recevable à porter toute réclamation devant l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution), que l’abus soit le fait de la banque ou de son précédent assureur".
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